La communication (Freesette)

De CRPE

La communication est nécessaire pour le développement intellectuel, affectif et langagier de l'enfant. En l'absence d'échange, pas de langage ; en cas d'insuffisance d'échanges, les retards peuvent être importants.

Entre code...

Le modèle centré sur le code et le message a soutenu toute la linguistique du XXème s. Selon ce modèle, communiquer c'est coder et décoder des messages.
L'émetteur a un message à faire passer (en rapport avec un référent) ; il le code et utilise un canal (sonore dans le cas de l'oral) ; au récepteur de décoder ce signal pour prendre connaissance du message.

En 1963, un linguiste d'origine russe, Roman Jakobson, reprend ce schéma et le complète. Il distingue dans tout énoncé 6 facteurs constitutifs, dégageant de la sorte 6 fonctions du langage :

  • L'émetteur est concerné par la fonction émotive ou expressive du langage qui lui permet d'exprimer ses désirs... etc.
  • La fonction référentielle ou dénotative concerne le monde environnant, le référent, la situation dont on parle, le contexte.
  • La fonction conative ou incitative agit sur le récepteur sur lequel le langage a une action. Très présente dans les messages publicitaires ou les discours politiques.
  • La fonction poétique concerne le message lui-même, sa forme et son organisation.
  • La fonction phatique met l'accent sur le canal et tout ce qui réfère à la mise en contact, l'ouverture, le rétablissement et la fermeture de la communication.
  • La fonction métalinguistique porte sur le code dont on peut vérifier s'il est bien partagé.

... et activités pragmatiques

Dire que le sens et tout le sens est inclus dans le message, c'est ne pas tenir compte de tous les accidents de la communication et c'est ignorer l'importance des locuteurs, de la situation d'interlocution, des éléments extralinguistiques, des implicites et des habitudes culturelles de dire et de faire. Ces dimensions vont être prises en compte par la socio-linguistique des années 60, par les théories de l'énonciation et les linguistiques pragmatiques des années 70.

Le courant énonciatif

Les énoncés ne sont plus considérés comme des entités abstraites, coupées du contexte d'énonciation. Cette approche cherche les traces de l'inscription, dans le système de la langue, de ses conditions d'utilisation. On appelle "embrayeurs" ou "déictiques" les termes qui sont des repères personnels, spatiaux et temporels (ex : je souhaite te voir demain, ici même, devant cette statue."). Ils caractérisent la situation d'interlocution et se réfèrent au "moi-ici-maintenant" des locuteurs.
Dans ce domaine de l'énonciation, on peut aussi retenir les phénomènes de "modalités" ou de "modalisations". Ils trahissent la position que prend le locuteur par rapport au contenu de son énoncé.

Les linguistiques pragmatiques

Les grands champs d'étude sont l'implicite, les actes de langage et l'interaction communicative. Les deux idées-force : la langue met toujours en oeuvre la subjectivité et les rapports sociaux.

  • L'implicite : les implicitations concernent les manières de dire qui vont au-delà de ce qu'elles disent littéralement. On peut dire sans dire avec des présuppositions ("tu devrais toi aussi arrêter de fumer"), des sous-entendus, des allusions, des implications.
  • Les actes de langage : théorie élaborée par le philosophe anglais J. Austin et développée par J. Searle. Elle part de l'idée que dire, c'est aussi faire c'est-à-dire tenter d'influencer l'autre et c'est accomplir un certain type d'acte appelé "acte illocutoire, comme questionner, ordonner, promettre, suggérer... Austin a opposé 2 types d'énoncés : les "énoncés constatifs" qui décrivent une réalité extérieure sans prétendre la modifier et les "énoncés performatifs" qui transforment les choses. Certains dits "performatifs explicites" ont même la particularité de réaliser l'accomplissement de ce qu'ils énoncent : on dit et on fait en même temps ("la séance est ouverte"). Seul "je" peut être le sujet d'un énoncé performatif et le présent de l'indicatif est le seul possible.

Certains manuels de l'école primaire se sont saisis des actes de langage et en ont fait l'objet de petites activités d'orale comme l'île aux mots de Nathan.

  • Les interactions : dans les années 60, apparition aux USA, sur l'instigation de H. Grice, de "l'analyse conversationnelle" puis floraison de travaux à partir des années 70 portant sur les échanges discursifs en situation. "Parler, c'est communiquer et communiquer, c'est inter-agir". 1/ L'émission et la réception sont en détermination mutuelle : "L'interaction verbale est la réalité fondamentale du langage" ; 2/ Influences entre les interactants : "Parler, c'est échanger et c'est changer en s'échangeant" ; 3/ le sens n'est pas donné, c'est le produit d'une construction collective. Il est co-construit par les co-énonciateurs ; 4/la communication intègre des unités non verbales, des mimiques, des gestes, des expressions qui participent à l'élaboration du sens : la communication est multicanale et pluricodique.

Cette théorie cadre bien avec la psychologie de l'enfant héritée de Wallon, Piaget et Bruner qui pose l'interaction de l'enfant avec son environnement comme l'un des moteurs de l'acquisition du langage, de la pensée et de la personnalité.

Le processus de communication verbale est donc plus complexe que ne le laisse supposer la théorie de l'information. La conception suivant laquelle les mots représentent le monde et traduisent la pensée cède en outre du terrain à celle dans laquelle le sens s'épaissit du poids du contexte et des implicites.